CONTEXTE — you're entering snoqualmie.

Snoqualmie, Washington State, 1992.

La nuit tombe sur Snoqualmie, et très vite, l'enveloppe toute entière d'un voluptueux brouillard. Peu à peu, les quelques rues de la petite bourgade se vident. Les âmes qui les peuplent le jour se réfugient derrière leurs fenêtres, à travers lesquelles une lumière jaune jaillit encore sur le bitume humide jusqu'à ce que se referment les rideaux en velours.
A l'heure où sonne minuit, les honnêtes gens rejoignent leurs chambres à coucher et se glissent dans les draps glacés parfumés à la lessive bon marché.
Mais la ville ne dort pas toute entière. La jeunesse rêve à des jours lointains, allongé·e·s sur leurs draps pastels, walkman inévitablement vissé sur les oreilles. Les noctambules se resservent un dernier café au Diner du village, au son des programmes nocturnes de la radio locale. Ils assomment qui veut bien les écouter d'histoires abracadabrantes, et l'on parle aussi bien d'une légendaire apparition de Bigfoot que de la tempête de grêle annoncée pour le lendemain. On se souvient du temps où les thermes étaient un haut-lieu des curistes, où les trains circulaient. Aujourd'hui, les rails sont recouverts de mauvaises herbes et les piscines sont vidées, vulgaires trous de béton. Les anciens s'en targuent encore : autrefois, cette ville était glorieuse. Maintenant, ce n'est plus qu'un fantôme aux rues pavées des souvenirs d'un temps révolu.
Derrière les sycomores, déjà l'aube perce les branchages d'une lumière diaphane. Bientôt, le jour va se lever, et avec lui le retour à l'ordinaire qui assomme celles et ceux qui, cette nuit encore, ont rêvé de s'en échapper.